Le phosphore, un enjeu pour maitriser l’eutrophisation des plans d’eau

Thématique | Eutrophisation | Publié le 01 sept. 2015
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Le phosphore (P) est, avec l’azote, un élément limitant de la production primaire des écosystèmes terrestres et aquatiques. Une présence excessive de phosphore dans les plans d’eau peut contribuer à leur eutrophisation.

Ainsi, la maîtrise des flux de P constitue un enjeu prioritaire sur différents territoires du bassin Loire-Bretagne où plus de 70% des plans d’eau sont déclassés en terme de qualité des eaux, en raison de leur niveau trophique très élevé, sur la base des indicateurs P et chlorophylle. En Bretagne, la problématique des rejets domestiques et industriels de P est de mieux en mieux traitée et l’attention se porte sur la part agricole diffuse dont provient majoritairement le P présent dans les eaux de surface.

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La présence excessive de phosphore biodisponible dans les écosystèmes aquatiques représente une menace puisque le phosphore, avec l’azote, est à l’origine de l’eutrophisation, c’est-à-dire l’enrichissement excessif en éléments nutritifs qui se manifeste par le développement massif de phytoplancton, d’algues et/ou de végétaux aquatiques. Cette perturbation des écosystèmes aquatiques peut aussi être à l’origine de problèmes de santé publique, comme la prolifération de cyanobactéries sécrétant des toxines dangereuses pour l’homme.

Sources et disponibilité du phosphore

La disponibilité du phosphore dans les écosystèmes terrestres dépend de l’altération des roches à l’origine de la formation des sols, ainsi que des apports anthropiques. En contexte agricole, on a cherché à accroître sa disponibilité pour les cultures, soit en recyclant de la matière organique, soit en important des engrais minéraux. Si une disponibilité élevée du phosphore dans les sols agricoles est souhaitable pour une croissance des plantes cultivées, elle s’accompagne souvent d’un transfert accru vers les milieux aquatiques, qui s’ajoute aux émissions ponctuelles d’origine industrielle ou domestique.

Le phosphore diffus (P) se retrouve de façon dominante sous forme non soluble, accroché aux particules de sol (P particulaire). Il est ainsi stocké de façon prépondérante dans les sols et parfois en quantités pouvant devenir extrêmement importantes. Plus les sols vont être riches en phosphore, plus la moindre particule de sol qui va arriver à la rivière risque d’apporter du phosphore.
Il est transporté majoritairement par le ruissellement de surface qui emporte les particules de sol. Il peut être capturé au cours de son transfert dans les talus et dans les haies, ainsi que dans les bandes enherbées et dans les zones humides où il va s’accumuler. Au fur et à mesure, ces zones peuvent devenir de moins en moins efficaces pour le retenir, et voire se saturer complètement. Elles pourront alors relarguer ensuite du phosphore sous forme soluble. Quand ces zones ne sont pas gérées avec précaution, c’est un stockage qui peut n’être que très temporaire.

Impacts sur la qualité des eaux douces

La problématique du phosphore s’inscrit dans un contexte réglementaire national, en application de la DCE et dans celui du SDAGE Loire Bretagne. La disposition 3B-1 du SDAGE demande des mesures de réduction des apports et des transferts de phosphore diffus à l’amont de 22 plans d’eau prioritaires sensibles à l’eutrophisation, et utilisés pour l’alimentation en eau potable et particulièrement exposés au stockage du phosphore particulaire.

Les deux principaux axes d’amélioration visés et à appliquer conjointement sont d’une part, la réduction des risques de transfert vers les eaux, notamment par la lutte contre l’érosion des sols et d’autre part, le respect de l’équilibre de la fertilisation dans le but de stopper l’enrichissement des sols.

Amélioration des connaissances pour comprendre et agir

Les pollutions ponctuelles (urbaines, domestiques, industrielles) sont de mieux en mieux traitées et l’attention se porte depuis quelques années sur la part diffuse liée aux activités agricoles. La lutte contre l’eutrophisation implique donc de réduire les flux de phosphore d’origine agricole transmis principalement par ruissellement.

Or, les flux et les formes du P émis par les bassins versants agricoles et leur variabilité spatio-temporelle sont aujourd’hui mal connus. De plus, le lien n’est pas explicitement fait entre les systèmes agricoles, les stocks de P des sols et leur disponibilité, les flux sortants particulaires et dissous. Ces défauts d’explicitation rendent l’action publique difficile.

Le Creseb a organisé deux journées scientifiques et techniques en s’appuyant sur les expériences des territoires et le programme scientifique TRANS-P : une première journée (23 juin 2014) au moment du démarrage du projet et une seconde journée (22 mars 2017) autour de la restitution des résultats finaux de ce projet. La motivation était de procéder à un échange croisé des savoirs acquis et des questions soulevées par les territoires et les équipes de recherche, sur la problématique de la pollution des eaux de surface par le phosphore. et d’envisager, si nécessaire la construction de projets collaboratifs pour aller plus loin dans la compréhension des variables de contrôle et la gestion opérationnelle des émissions de phosphore dans les bassins versants.

Mieux comprendre et agir contre la pollution phosphorée
TRANS P | Transfert du phosphore des terres agricoles au cours d’eau : stocks et flux, de l’observation à la modélisation

Pour aller plus loin

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